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Les entreprises canadiennes à croissance rapide dépendent de leur capacité à financer leur fonds de roulement et leur développement

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Au-delà des banques : vers qui d’autre se tourner pour obtenir le capital dont votre entreprise a besoin?

Écrit par Jim McElgunn, Canadian Business Magazine, 19 juin 2012

[…] Dans le palmarès Profit 200 des entreprises à la croissance la plus rapide, 45 % réclament des crédits d’impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental (RS&DE). Au total, Ottawa a émis 3,6 milliards de dollars en crédits à 21 000 entreprises en 2011.

Malgré cela, l’Agence du revenu du Canada (ARC) estime que 40 % des entreprises admissibles au programme de RS&DE ne soumettent pas de réclamation. Pierre Savignac, président d’Emergex RS&DE Subventions (en 157e position sur notre liste), une firme de consultants basée à Montréal et spécialisée dans les programmes gouvernementaux pour les entreprises, affirme qu’une réclamation potentielle peut être trop petite pour qu’il vaille la peine de déposer une demande, en raison de la complexité, des efforts, du temps et des risques associés à la bureaucratie gouvernementale. Mais, il considère qu’il vaut la peine de réclamer tout crédit d’impôt d’au moins 50 000 $. Savignac conseille également aux entreprises de toutes les industries (même l’agriculture, les cosmétiques ou les ressources naturelles) d’évaluer leur admissibilité potentielle, même si celles-ci ne se considèrent pas comme technologiques.

D’autres formes d’aides gouvernementales sont populaires auprès des entreprises de Profit 200, 16 % d’entre elles ayant utilisé au moins un programme. Savignac souligne deux programmes auxquels des milliers d’entreprises seraient admissibles, mais pour lesquels elles font peu de demandes. Le premier est l’agence de développement économique pour chaque région, tel que Développement économique Canada pour les régions du Québec. Ces organisations accordent des prêts aux entreprises en période post-démarrage. Jusqu’à 50 % des coûts admissibles de l’infrastructure, de l’équipement et d’autres améliorations peuvent être financés. Le second est le programme de financement des petites entreprises du Canada, par lequel Innovation, Sciences et Développement économique Canada garantit 75 % du coût des prêts jusqu’à 500 000 $ pour de l’équipement, des biens immobiliers, des améliorations locatives, et d’autres actifs.

Selon Savignac, faire appel à ces programmes est moins laborieux qu’il n’y paraît, et les organismes gouvernementaux de financement sont heureux de visiter l’entreprise afin d’évaluer son admissibilité.

Bien avant de devenir entrepreneur, Kurt Hibchen a appris une leçon importante sur le financement des entreprises. Lorsqu’il travaillait en conception à l’Office national du film, Hibchen confia à un collègue sous-traitant que, bien qu’aimant le travail, il était mécontent que l’ONF ne l’ait pas payé à la date promise. « J’ai donc dit à l’ONF que je ne retournerais pas travailler jusqu’à ce qu’ils me paient, se souvient Hibchen. Ils n’arrivaient pas le croire, mais ils ont payé rapidement! »

« Nous sommes un fournisseur de services de design, pas une banque », déclare Hibchen, président et chef de la direction chez Toboggan, un designer d’expositions de musée se classant au 92e rang sur la liste Profit 200 de 2012 des entreprises à la croissance la plus rapide. « De nombreux propriétaires d’entreprises estiment que cette politique nuirait à leurs relations avec leurs clients. Mais ce n’est pas du tout le cas. Les clients finissent par te respecter davantage. »

La ligne dure adoptée par Toboggan n’est qu’une des nombreuses façons astucieuses que les entreprises de Profit 200 ont trouvée afin de relever le défi de trouver du capital d’exploitation et de développement. Votre entreprise est confrontée au même défi, quel que soit le secteur qu’elle exploite. Et les solutions décrites ici offrent des solutions variées au financement bancaire classique. Pour des façons de travailler efficacement avec les banques, voir Bank On This.

Endo Networks inc. (60e position) adopte une approche différente à la tâche essentielle consistant à ne pas manquer de liquidités. Peter Day, le président de cette agence de marketing située à Oakville, Ontario, déclare qu’il a adopté sa propre méthode pour gérer cette ironie amère : « Les clients sont tellement satisfaits de ce que vous leur fournissez qu’ils vous accordent rapidement des contrats croissants. Puis soudainement, vous vous retrouvez face à une crise de liquidité qui menace de vous ruiner. »

Endo a fait face à ce défi lorsque la taille des projets de son plus gros client est passée de moins de 200 000 $ à plus de 4 millions de dollars. Pour plusieurs de ses autres clients, les projets ont augmenté d’au moins dix fois. Sa solution a été d’amorcer une discussion franche avec ses clients à propos des projets qui causeraient une pression considérable sur les liquidités de l’entreprise. Les représentants d’Endo soulignent gentiment que leur firme aura besoin de financement externe afin de couvrir les dépenses importantes et que cette dépense de financement sera ajoutée à sa facture, à moins que le client et le fournisseur ne s’entendent pour trouver des façons de réduire ou d’éliminer ces coûts.

Plusieurs entreprises de Profit 200 se sont tournées vers une solution de rechange pour relever le défi du financement : les prêts à terme, mais pas d’une banque à charte. Matthew Horne, de Deco Windshield Repair inc. (21e position) explique ce que plusieurs entrepreneurs déplorent au sujet des banques à charte : « Le gestionnaire de compte nous apprécie, nous et notre entreprise. Puis, il remet notre demande de prêt au département du crédit, et c’est toujours refusé. »

Horne, dont le surnom est Capitaine Orange chez Deco, basé à Calgary, affirme que le département du crédit regroupe ses activités de kiosques mobiles de réparation de pare-brise dans la catégorie services et entretien automobile, même si Deco n’a pas la taille ou les actifs matériels typiques de cette catégorie. Deco. Les évaluateurs de crédit voient l’absence de dette de Deco comme un point négatif, parce que l’entreprise n’a pas utilisé de dette pour faire croître l’entreprise.

Un diplômé en finance de l’Université de Calgary qui faisait un stage chez Deco a ouvert les yeux de Horne sur une solution de rechange qu’il n’avait pas considérée : la Banque du développement du Canada (la BDC a financé 23 % des entreprises de Profit 200). Horne mentionne que la société d’État a évalué son entreprise de façon plus générale que les banques traditionnelles, notamment en tenant compte de la personnalité du propriétaire, ainsi que des marges brutes et des revenus par employé croissants. « Ils pouvaient voir que nous n’éprouvions pas de difficultés et que manifestement, nous croissions autant que nous pouvions nous le permettre », dit Home.

Pour de nombreux entrepreneurs, le plus grand défi à obtenir du financement est de trouver quelqu’un qui comprend vraiment ce que fait leur entreprise. Christopher Walker a relevé ce défi en 2005, lorsque son entreprise, CCL Financial inc. (31e position), a commencé à racheter des dettes impayées et à percevoir les débiteurs pour son propre compte.

Walker, président et chef de la direction chez CCL, déclare que lorsque CCL cherchait du financement bancaire, « Nous avons vu des regards pétrifiés; ils se demandaient pourquoi nous voulions racheter des dettes déjà radiées des livres comptables. »

CCL a fini par obtenir du financement de KRG Capital Partners, une société d’investissement privé située à Denver. KRG a tellement aimé les rendements qu’au lieu de retirer ses billes de CCL en 2009 comme prévu, elle a investi davantage. Ce soutien durable a été une des clés de la croissance rapide de CCL.

« Durable » est un mot rarement associé au financement par les fournisseurs. La plupart des entreprises exploitent cette source ad hoc, se heurtant à une période difficile avant de demander à un fournisseur plus de temps pour payer. Mais, Douglas Grosfield, président et chef de la direction de Xylotek Solutions inc. (142e position), a adopté une approche différente par rapport à ce type de financement, ce qui a donné à son entreprise une source de capital importante et durable.

En 2005, Grosfield a cofondé Xylotek, un revendeur et consultant informatique de Cambridge, Ontario. Son partenaire et lui avaient démarré en lion en obtenant une commande de matériel informatique valant 250 000 $. Mais, ils n’avaient ni l’argent pour payer ni d’antécédents de crédit. Grosfield, président et chef de la direction de Xylotek déclare : « Nous avions besoin de quelqu’un pour nous soutenir avec du financement sans modalités ou taux d’intérêt punitifs. »

Les partenaires ont trouvé ce crédit en promettant à Ingram Micro, un géant de la vente en gros de produits informatiques, que Xylotek achèterait exclusivement d’Ingram dans toutes les catégories qu’elle fournit, en échange du financement de cet achat. La grande expérience des partenaires dans le secteur a contribué à persuader Ingram de prendre le risque d’octroyer du crédit à une entreprise en démarrage.

Grosfield mentionne qu’en fin de compte, « Ils ont écouté leur instinct, et nous avons semblé dignes de confiance. Nous avons récompensé leur confiance en nous par une fidélité continue et des transactions de plus en plus importantes » qui s’élèvent maintenant à quelques millions de dollars par an. « Sans ce genre de confiance mutuelle et de partage de risques, explique Grosfield, nous n’aurions pas pu établir de relations avec des clients pour des projets d’une envergure suffisante pour apparaître sur la liste de Profit 200. »

Martin Lamontagne indique que, quelle que soit la source de financement utilisée par votre entreprise pour alimenter sa croissance, il est essentiel de reviser régulièrement votre financement, afin de déterminer si vous tirez le meilleur parti de chaque source. « Beaucoup d’entrepreneurs pensent que leur besoin de financement diminuera au fur et à mesure de leur croissance, affirme Lamontagne, président et chef de direction de Creaform inc. (175e position), mais au contraire : plus vous vendez, plus vous avez besoin de financement. »

À l’instar de nombreuses entreprises, le développeur de technologie de numérisation 3D de Lévis, Québec, s’est débattu à ses débuts pour attirer des capitaux. « Lorsque nous avons fondé Creaform en 2002, nous étions prêts à céder une participation de 30 % de notre capital-actions pour 300 000 $, mais nous n’avons trouvé aucun investisseur », se rappelle Lamontagne. Creaform a donc plutôt démarré avec un prêt de 50 000 $ provenant de son agence locale de développement économique, ainsi qu’avec un second prêt hypothécaire sur les résidences des cofondateurs.

En 2004, l’entreprise avait attiré un investisseur en capital de risque. Depuis, Creaform a utilisé une longue liste de sources de financement, incluant deux autres investisseurs en capital de risque, des crédits d’impôt de RS&DE, des investisseurs privés, des clients, des prêts bancaires, des cartes de crédit et deux programmes d’une société de développement économique du Québec.

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Traduit et adapté par Emergex de : www.canadianbusiness.com/innovation/dollars-and-sense

La grande vitesse dans Internet est en chemin

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Tiré du Journal Les Affaires, 21 décembre 1996, signé par Yan Barcelo

Les câblodistributeurs ont pris les devants dans la poursuite de la vitesse, notamment du côté de Cogeco

Pris dans l’engouement d’Internet, plus que toute autre chose, c’est un supplément de vitesse que les internautes réclament en premier lieu. Bonne nouvelle : la plomberie qui permet enfin cette accélération se met en place à un rythme accéléré. Mauvaise nouvelle : il faudra patienter encore un an ou deux avant qu’une majorité d’internautes puissent en profiter. Il ne fait pas de doute que ce sont les câblodistributeurs qui ont pris les devants dans la poursuite de la vitesse, notamment du côté de Cogeco. Denis Bélanger, vice-président, ingénierie et développement, chez Cogeco Câble, nous affirme que 50 % du réseau de Cogeco est maintenant doté de la capacité bidirectionnelle, donc capable d’offrir le service Internet ;a la vitesse de 500 Mbs. Sur le territoire québécois, par contre, cette proportion tombe à environ 30 %. « Il n’y a pas un seul grand câblodistributeur qui puisse se vanter d’avoir rendu bidirectionnel à ce jour 50 % de son réseau », a indiqué M. Bélanger. La compagnie prévoit que 75 % de ses abonnés seront rejoints par des réseaux bidirectionnels d’ici au 31 août 1997, et 100 % au 31 août 1998. Pour l’instant, les principales installations bidirectionnelles se sont faites dans des villes comme Trois-Rivières, Shawinigan, Drummondville, Saint-Hyacinthe et Rimouski. Du côté de Vidéotron, l’installation du bidirectionnel s’achèvera environ un an plus tard que chez Cogeco. Pierre Savignac, chef de produit, Internet, chez Vidéotron, annonce que le dernier lien bidirectionnel entrera en fonction quelque part au cours de 1999. La région de Montréal, pour sa part, sera « bidirectionnalisée » dans les 12 à 18 prochain mois. Pour l’instant, des morceaux significatifs du réseau de Vidéotron autour de Montréal offrent le lien Internet haute vitesse par modem-câble. C’est le cas à Brossard, par exemple, à Outremont, Lachine, Greenfield Park, Notre-Dame-de-Grâce, Saint-Lambert et Lorraine. Les prochaines zones visées sont, pour la région de Montréal, Côtes-des-Neiges et Repentigny, en province, Chicoutimi.

Multiplier les cellules

On objecte souvent, du côté des compagnies de téléphonie, que le réseau du câble n’est pas vraiment approprié pour la grande vitesse. Parce qu’il s’agit d’un réseau partagé, dit-on, tout nouvel abonné contribue à réduire d’un cran la vitesse de transfert. Balivernes, répondent les « câblos ». Le problème n’existe qu’en théorie, dans la mesure où on continuerait d’empiler indéfiniment les abonnés dans la même cellule de circulation. Pour éviter cela, il suffit de multiplier les cellules. Ainsi, à partir de la tête de réseau dans une localité, les câblos étendent ce qu’on pourrait appeler un « réseau local » sur lequel ils ne greffent pas plus de 300 abonnés (50 par fréquences de transmission, sur six fréquences distinctes). Dès que s’amène le 301e abonné, ils ouvrent tout simplement une nouvelle tête avec son propre « réseau local », sur lequel ils ne grefferont pas plus que 300 autres abonnés. Chez Cogeco, par exemple, on a déterminé que, dans les périodes de pointe, en tenant compte d’une répartition normale de la demande, les internautes ne souffrent d’aucune détérioration sensible de la performance jusqu’à la concurrence de 50 abonnés sur une fréquence donnée. Côté mensualités, le lien de base Internet par modem-câble coûte 39,95 $ chez Cogeco et 49,95 $ chez Vidéotron. S’ajoute entre 70 et 100 $ pour les frais d’installation. La limite de consommation s’élevant au-delà de deux giga-octets, il n’y a pas, à toutes fins pratiques, de frais additionnels de consommation. Les deux compagnies envisagent également d’offrir un service à haute vitesse aux entreprises, où les vitesses de transmission peuvent, en théorie toujours, s’élever jusqu’à 10 Mbs. Cogeco mène des essais en ce moment à Trois-Rivières auprès de 15 compagnies, tandis que Vidéotron n’a pas arrêté ses choix sur ces services d’affaires.

Venu du ciel

Dans la même catégorie de la vitesse de 500 Kbs, on trouve aussi Télésat et son lien DirecPC par satellite. La connexion, avec ce fournisseur, est toutefois tronquée. La réception, qui parvient à l’internaute d’un satellite par l’intermédiaire d’une antenne se fait à haute vitesse. L’envoi, par contre, se fait par la voie téléphonique, soit à la vitesse de 14,4 ou de 28,8 Kbs par modem analogique ou à la vitesse de 64 ou de 128 Kbs par lien numérique RNIS. Ce lien téléphonique ajoute donc des frais additionnels puisque l’internaute doit payer 19,95 $ pour son abonnement mensuel à DirectPC, en plus de débourser les frais habituels d’abonnements à un fournisseur Internet. S’ajoute aussi le coût additionnel de l’antenne, et de son installation, qui s’élève à environ 1 000 $. La limite mensuelle de consommation avec DirectPC est fixée à 30 Mbs, chaque Mo additionnel étant facturé 0,80 $ durant les heures d’affluence, 0,60 $ hors affluence. D’autres formules sont également disponibles, notamment pour les entreprises. Le service Surfeur 1000, par exemple, coûte 300 $ par mois, par usager, et inclut un giga-octet de transfert, chaque heure additionnelle ajoutant 0,30 $ de frais. Le service de Télésat présente un avantage très net , mais temporaire, face à l’offre des câblodistributeurs. Comme le signale Yves comtois, directeur des ventes au Québec, « tant que le câble-modem n’est pas en place dans une région, DirectPC est le seul à pouvoir offrir immédiatement la vitesse de 500 Kbs ».

1,5 Mbs au domicile

Du côté de Bell Canada, l’offre de vitesse porte le nom de RNIS Z@P, où la vitesse de transfert s’élève à 128 Kbs. Compte tenu de la vitesse de croisière moyenne du net, qui oscille entre 100 et 150 Kbs, l’abonné du service Z@P devrait donc se sentir tout à fait confortable. Pour l’instant la capacité RNIS s’étend à 70 % des abonnés du réseau de Bell sans plus de précision. Par contre, l’offre de Bell est quelque peu coûteuse comparativement à celle des câblodistributeurs. Le prix de l’abonnement se situe entre 51 et 57 $ (55 $ à Montréal), ce à quoi il faut ajouter l’abonnement à un fournisseur Internet, Sympatico ou autre. S’ajoutent aussi 495 $ pour l’adapteur RNIS (une sorte de modem ), qu’on insère dans l’ordinateur, et 119 $ pour l’installation. Par contre, Z@P offre l’avantage particulièrement intéressant d’épargner le coût d’une ligne téléphonique puisque la même ligne RNIS sert autant aux communications Internet que téléphoniques.

Vitesse théorique maximum : 54 Mbs

Cependant, la grande vitesse chez Bell viendra avec le service LNPA (Ligne numérique à paire asymétrique; acronyme anglais : ADSL). Au départ, ce service offrira un lien de base de 1,5 Mbs au domicile. On parle d’une vitesse théorique possible de 54 Mbs, mais la chose est encore expérimentale et ne sera pas disponible avant longtemps. Toutefois, à une telle vitesse de pointe le LNPA offrirait une vitesse de pointe environ quatre fois supérieure à la vitesse maximale que fournissent pour l’instant les câblodistributeurs. Cependant, en théorie, par simple multiplication des bandes de fréquences dans leur fil de transmission, les câblos sont déjà capables de fournir un débit de trois à quatre gigaoctects. Néanmoins, il faut dire qu’au-delà de 6 Mbs, la question de la vitesse perd beaucoup de son acuité puisque, à cette vitesse, on est capable d’envoyer du film avec une qualité impeccable, au plein rythme de 30 images par secondes. Contrairement au RNIS, le LNPA est un lien non commuté. D’une façon pratique, cela signifie qu’il offre sa vitesse point à point, non sur l’ensemble du réseau de Bell. Il s’agit donc pour l’abonné du service d’établir un pipeline à haut débit entre lui et son fournisseur Internet. Présentement en test à Saint-Bruno, le LNPA devrait être commercialisé vers la mi-97, prévoit-on chez Bell. On ne sait rien de la tarification encore. « Les coûts ne sont pas déterminés encore, a affirmé Normand Toupin, porte-parole de la division Inforoutes, mais ils seront concurrentiels par rapport ; à l’offre du câble-modem, je peux vous le garantir. » Dans la course à la haute vitesse Internet, notons que le début de 1997 devrait voir l’arrivée sur le marché des nouveaux modems analogiques capables d’atteindre 56 Kbs. En vue des 500 Kbs du câble, s’agit-il de grande vitesse ? Non, mais plusieurs jugeront qu’il s’agit d’un pis-aller valable, offrant quatre fois le débit du modem 14,4 Kbs dont la majorité des internautes sont encore affligés.

Des anges à la rescousse des PME

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Publié dans « PME, le magazine de l’entrepreneurship du Québec », édition de mai 1998, écrit par Hélène Buzetti

Mi-capitalistes, mi-philanthropes, les anges investisseurs financent les startups prometteurs que les banques ignorent

Un jeudi soir de février dernier, 20 jeunes entrepreneurs ont franchi les lourdes portes du très sélect Club Saint-Jacques, au centre-ville de Montréal. Leur cœur battait à tout rompre, car ils allaient peut-être rencontrer leur bon ange, un ange sans ailes, mais avec les poches assez profondes pour financer leurs rêves d’affaires. Organisées conjointement par la Fondation du maire de Montréal pour la jeunesse et la Jeune Chambre de commerce de Montréal, les Soirées des Anges financiers permettent aux jeunes entrepreneurs de la région de tisser des liens avec les investisseurs privés. Ils peuvent ainsi recevoir d’eux le soutien moral et monétaire que les institutions financières ne sont pas encore prêtes à leur accorder parce qu’ils n’ont pas d’historique, pas d’actifs, peu d’expérience, et que leur PME présente beaucoup de risques. Retour à ce soir de février dernier au Club Saint-Jacques. Œuvrant autant dans les domaines de la biotechnologie, des technologies de l’information, de l’environnement et de la mode, les 20 jeunes PME présentes avaient comme point commun d’avoir été lancées depuis trois ans ou moins par des jeunes de 18 à 35 ans, et d’être encadrées par des organismes de parrainage comme le Centre d’entreprise et d’innovation de Montréal (CEIM), Inno-centre, l’Association communautaire d’emprunt de Montréal ou les Services d’aides aux jeunes entrepreneurs (SAJE). Après avoir exposé leurs objectifs aux 150 figures du monde des affaires présentes, les entrepreneurs ont tenu des kiosques en espérant attirer et séduire un de ces mystérieux investisseurs. « C’est un SAJE qui a soumis notre candidature, raconte Denis Lamothe, président d’Icarus. Notre objectif est de faire connaître nos talents d’administrateurs et l’énorme potentiel de notre technologie. » Ce startup a élaboré un dispositif permettant d’acheminer en temps réel et en toute confidentialité des conversations téléphoniques par le biais d’Internet. Puisque l’appareil élimine les frais d’interurbain, l’utilisateur en amortit le coût d’achat en moins de six mois. Participer à cette soirée est aussi pour ces jeunes une occasion inouïe de rencontrer des clients potentiels. « Il y a ici des gens qui mettent sur pied des centres d’appels et qui seraient intéressés à intégrer notre technologie ! confie Denis Lamothe. Bien sûr, nous aimerions un apport d’argent frais pour amorcer la commercialisation de notre produit. Mais, nous serions aussi capables de remplir une telle commande. »

Réseau de contacts

« Plus que d’argent, ces jeunes ont besoin de conseils, de parrainage et d’avoir accès à un réseau de contacts », résume Marguerite Blais, directrice générale de la Fondation du maire de Montréal et instigatrice de l’événement. Studio Vox, par exemple, qui participait aussi à la soirée, recherchait surtout le soutien de lobbyistes en règle. Laurent Gallard et Gabrielle Béroff, les copropriétaires, ont développé un système audio de description d’images permettant aux personnes aveugles de visionner des films dans les mêmes salles que les personnes voyantes : les descriptions étant captées au moyen de casques d’écoute à infrarouges ultra légers, les non-voyants peuvent en plus entendre les murmures de la salle de cinéma et ainsi, ne pas se sentir isolés. Cependant, pour que le produit devienne rentable, il faudrait que le gouvernement impose des quotas sur le nombre de productions à décrire. « Notre ange idéal serait quelqu’un qui est prêt à nous ouvrir des portes au gouvernement », dit Gabrielle Béroff. « L’ange type que nous cherchons ce soir est une personne capable de comprendre que lorsqu’on parle de technologie et de matière grise, on a peu de garanties à offrir, résume Pierre Savignac, président fondateur d’Emergex Subventions. On cherche des partenaires qui font preuve de créativité, qui s’intéressent plus à ce qu’on fait qu’à ce qu’on possède. »

Qui se cache sous l’auréole?

Les anges financiers incarnent la rencontre de la philanthropie et du capitalisme. Foncièrement investisseurs, ce sont habituellement des gens d’affaires parvenus au faîte de la réussite et désirant faire profiter la relève de leur argent et de leur expérience. Selon une étude du Conseil de la science et de la technologie sur l’investissement informel, le Québec compterait 2175 anges disposant chacun d’entre 50 000 dollars et un million de dollars, pour un portefeuille d’une valeur totale de 1,36 milliard de dollars ! Ils investissent dans de jeunes entreprises prometteuses comme celles présentées lors des Soirées des Anges, ce qui leur permet, contrairement à la bourse, de surveiller leur argent tout en se sentant utiles. Le comédien et homme d’affaires Daniel Pilon figure au nombre de ces fameux bienfaiteurs : « Il y a une sorte de postulat économique, à savoir que la mondialisation répond à tous les problèmes, dit-il. Mais, ça mène à un capitalisme sauvage et ça enlève des possibilités aux jeunes. Toutes les décisions financières sont désormais motivées par l’esprit du gain. On veut des résultats rapides à la bourse. Les anges encouragent plutôt ceux qui ont de bonnes idées et acheminent les capitaux vers ceux qui les méritent. » Mais, les anges ne s’affichent pas tous comme lui. La plupart fuient à l’approche des journalistes. « Être ange, ce n’est pas une chose dont les gens se vantent, indique Marguerite Blais. Nous n’avons pas choisi le terme ange pour rien. Il y a quelque chose d’ésotérique là-dedans. Et beaucoup ne portent pas le bon chapeau. Ils se présentent comme représentants d’une banque, mais ils viennent parce qu’ils veulent investir un peu de leur propre argent. »

Pour stopper l’exode des cerveaux

L’idée d’organiser une Soirée des Anges financiers est née dans l’esprit de Marguerite Blais, inquiète de « l’exode des cerveaux et de la grisaille qui plane sur Montréal. » Il faut tendre la main à la relève, prêche la directrice générale de la Fondation du maire : « La compétition appartient au passé et le présent se conjugue au partenariat. » Très forte à Silicone Valley, la culture des anges financiers s’est développée ici dans les régions de Québec et de la Beauce où ce genre de soirée s’organise régulièrement. À cause de sa taille, de sa diversité et de sa multiethnicité, Montréal souffre d’une fragmentation qui rend difficile l’émergence d’un esprit d’entraide similaire. « On veut que les jeunes restent, insiste Mme Blais. On veut développer des entrepreneurs civiques qui redonnent à la communauté après avoir été eux-mêmes aidés. » La Soirée des Anges financiers se voulant avant tout une vitrine pour les jeunes entrepreneurs, il est difficile d’en quantifier les effets bénéfiques, d’autant plus que la Fondation n’effectue pas de suivi systématique des entreprises. Tels des entremetteurs, les organisateurs ne font qu’inviter dans une même pièce ceux qui ont de l’argent et ceux qui ont des idées, sans garantir de résultats. Certains participants repartent donc bredouilles, alors que d’autres ont rempli leurs poches de cartes d’affaires de gens potentiellement intéressés.

Le choc des Titans

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Publié dans la revue Planète Internet, édition de septembre 1996, écrit par Patrick Bonduelle La cloche a retenti. Sur le ring du marché de l’Internet, fournisseurs d’accès, câblodistributeurs et compagnies de téléphone se battent pour dominer le marché de la connexion. Mais au terme du premier round, l’enjeu portera aussi sur le contenu des inforoutes. Depuis deux ans, la compétition bat son plein entre les fournisseurs d’accès. Les tarifs des connexions ont chuté à moins de 30 $ par mois, et la clientèle, fortement sollicitée, se montre de plus en plus exigeante. Les petits fournisseurs cèdent du terrain aux grosses pointures, parfois à coup de fusions ou d’acquisitions. Après avoir grappillé les clients d’Infobahn et d’Accent Internet, Total.Net cumule aujourd’hui 51 000 membres au Canada, 25 000 au Québec dont 18 000 à Montréal. I-STAR et ses 60 000 clients menacent aussi les poids moyens comme le pionnier CAM – organisme à but non-lucratif animé par huit employés et comptant 4 000 membres – ou Génération.net (3 000 membres, trente employés). Mais le véritable bras de fer se joue entre « Telcos » et « Câblos », qui, avec des technologies différentes, offrent des vitesses de connexion supérieures et libèrent la ligne téléphonique.

L’offensive des câblos

Début juin, une vague de films publicitaires déferle sur les écrans : « Vous allez voir c’est quoi « surfer sur le Net » ! », clame Vidéotron. Pour ceux qui naviguent à l’ombre de leur modem 28,8 kb/s, la relève technologique d’une connexion par modem-câble ne manque pas d’attrait. Grâce au jumelage de la fibre-optique, du câble coaxial et d’un modem performant, les câblos promettent encore plus de vitesse ; « jusqu’à mille fois plus vite » comme Vidéotron. Mais la réalité est plus complexe. La technologie du modem-câble est testée depuis 1995 par Rogers et Cogeco. Ces entreprises annoncent des vitesses d’accès multipliées par… 20. « Il s’agit, en fait, d’une vitesse théorique, celle du modem utilisé. Mais, en pratique, d’autres facteurs, comme le bus de l’ordinateur, viennent freiner la navigation. Même à 500 kb/s, il s’agit d’un avantage concurrentiel unique, qui fait découvrir les limites du téléphone », se défend Pierre Savignac, chef de produits Internet chez Vidéotron.

Hybride versus « bidi »

Pour offrir cette technologie, les câblos doivent augmenter la bande passante de leurs réseaux. Une modernisation qui vise deux objectifs : la segmentation des réseaux en cellule d’environ 1 000 foyers rejoignables par fibre optique et câble coaxial, et le remplacement d’amplificateurs bidirectionnels dits « bidi ». Sur le territoire de Vidéotron, le réseau n’est pas uniforme. Les zones bidi permettent une transmission des requêtes par câble à 768 kb/s et une réception de l’information annoncée à 27 Mb/s. Ailleurs, on parle d’une communication « hybride » : les demandes sont envoyées par modem téléphonique et les données sont reçues via le câble. « À la fin de l’année, nous pourrons toucher 600 000 foyers en hybride. Et la vitesse de cette technologie est très proche du bidi car on sait que la quasi-totalité de l’information circule dans le sens serveurs-usagers », estime Pierre Savignac. D’ici à septembre 1997, Vidéotron compte investir environ 50 millions de dollars pour atteindre 500 000 foyers en bidirectionnel. Un objectif ambitieux, car son territoire, essentiellement urbain, rend la progression plus longue et délicate. À titre de comparaison, Cogeco Câble, après trois ans de modernisation en zone rurale et semi-rurale, couvre aujourd’hui 80 000 foyers (Shawinigan, Trois-Rivières, Drummondville, Sainte-Hyacinthe, et Rimouski). Six cents d’entre eux sont abonnés par modem-câble bidi. Vidéotron, de son côté, avance le chiffre de cent foyers câblés sur l’Internet mais espère séduire rapidement 30 % des internautes. Sa stratégie ? Détrôner les fournisseurs d’accès traditionnels sur leur propre terrain, celui du modem téléphonique. « On aurait les moyens d’acquérir des banques d’internautes, en rachetant des fournisseurs. Mais on est aussi capables d’aller chercher des clients, en proposant un service de qualité et différents types de connexions. Notre offre débute avec un forfait de cinq heures d’accès pour encourager les novices. Elle se poursuit avec un choix pour une connexion téléphonique illimitée ou par modem-câble », lance Pierre Savignac. Du côté de Cogeco, on reconnaît l’erreur d’avoir vanté la haute vitesse de la connexion avant même d’expliquer ce qu’était Internet. Mais on parie qu’une fois pris dans l’ivresse du modem-câble, les internautes refuseront de revenir à une connexion téléphonique. Avec le slogan : « Mettez du guépard dans votre souris », on propose un mois d’essai gratuit ainsi qu’un remboursement des frais d’installation et de la carte Ethernet, si la satisfaction n’est pas au rendez-vous.

La riposte des telcos

Face à l’offensive des câblodistributeurs, Bell est monté sur le ring avec son service RNIS z@p qui compte déjà sept cents abonnés, dont bon nombre de travailleurs autonomes. Mais il reste trop dispendieux pour le particulier, et deux à trois fois plus lent que le modem-câble. INET’96, dans lequel la compagnie a investi 460 000 dollars en commandites, fut l’occasion d’annoncer sa riposte. Une solution qui porte le nom de LNPA (Ligne numérique à paire asymétrique) et dote la ligne téléphonique actuelle d’une largeur de bande de 1,5 Mb/s pour la réception de données et de 64 kb/s pour l’envoi de données. En fait, câblos et telcos utilisent tous les deux des infrastructures existantes : le câble et le fil du téléphone. C’est l’ajout d’un puissant modem à chaque extrémité qui fait le différence. « En ce qui nous concerne, il n’est pas nécessaire de moderniser notre réseau », souligne Marcel Messier, vice-président Inforoute et multimédia de Bell. « Le travail est fait, la technologie est là, offrant une bande passante qui vous est dédiée et reste toujours disponible. La vitesse du modem-câble, elle, est aléatoire. Elle varie et peut ralentir aux heures de pointe à un niveau de congestion élevé », affirme-t-il. Réponse des câblos : les internautes n’utilisent pas la bande passante en même temps. Au delà d’un nombre critique d’abonnés, il suffit de reconfigurer le réseau pour procurer le même niveau de vitesse. Quoi qu’il en soit, Bell propose déjà une évolution vers 52 Mb/s et explique que, à 4 Mb/s, on pourra déjà télécharger deux cents pages de texte en moins d’une seconde et un page Web illustrée en moins d’un dixième de seconde. Les câblodistributeurs montent leur garde, sans inquiétude : « J’ai l’impression que Bell a été pris de court par notre offre. Dans la précipitation, ils ont annoncé, pour septembre, une phase de test à Saint-Bruno. Au-delà, on ne sait rien : ni la date du lancement, ni le prix de la connexion, ni surtout la fiabilité de cette technologie », soulève le chef de produits Vidéotron, en rappelant que la LNPA n’a pas encore fait l’objet d’aucune commercialisation et qu’elle suscite même des volte-face. « Bell Pacific aux États-Unis vient tout juste de se retirer du test, car il en coûterait 1 000 $ pour brancher un client. Dans ces conditions, qui va absorber les coûts ? », poursuit Pierre Savignac. Même réaction de la part de Cogeco : « Nous attendons l’offre de Bell avec une certaine sérénité. Les prix de la technologie LNPA s’annoncent trop élevés pour constituer une réelle menace », précise-t-on. Mais pour Bell, dans un marché de la téléphonie en pleine évolution, les économies d’échelle sur la vente des modems vont apparaître dans les prochains mois. Indépendamment des jeux commerciaux qui ne sont pas encore en place, on devrait arriver à une situation très concurrentielle. La différence devra se faire sur la richesse du réseau qui est derrière. Jusqu’à maintenant, le goulot d’étranglement était sur la portion d’accès. Bell va le déplacer vers les serveurs. C’est donc un beau jeu d’œuf et de poule, car maintenant ceux qui ont des contenus riches vont devoir augmenter aussi leur bande passante. Mais dans le cas du câble, l’utilisateur ne sait toujours pas où est le goulot : à l’accès ou quelque part sur le réseau… », renchérit Marcel Messier. La course à la vitesse se poursuit. Modem-câble, RNIS, LNPA pavent désormais la voie du multimédia dans le Web.

Au rythme du multimédia

Written by Pierre Savignac. Posted in Articles de Pierre Savignac.

Publié dans le magazine L’Économique, janvier-février 1997, écrit par François Perreault

Le nouveau beat de la communauté d’Affaires québécoise

Le monde du multimédia est en pleine croissance au Québec. Bien que relativement jeune, ce secteur s’affirme tant par ses innovations technologiques que par l’expertise, la qualité et la diversité des entreprises spécialisées qui le composent. C’est un monde où l’on retrouve à la fois des gros joueurs et des jeunes compagnies dynamiques et créatrices. Et chacun d’eux réinvente à sa façon le domaine des communications. En août dernier, le bulletin Invest-Québec, publié par le ministère québécois de l’Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie, estimait que l’industrie du multimédia au Québec, qui ne date pourtant que de quelques années, regroupait déjà plus de 400 entreprises et employait environ 2 500 personnes. Qui plus est, toujours selon Invest-Québec, les compagnies québécoises produisent 18 % des logiciels graphiques utilisés à des fins multimédias à travers le monde. La force de cette industrie se mesure aussi par les emplois qu’elle génère. Ainsi, Montréal occupe le septième rang parmi les villes nord-américaines pour ce qui est de la création d’emploi relié au technologies de l’information (voir la revue L’Économique, août-septembre 1996, page 34 « Montréal, leader de la nouvelle économie »). Les entreprises québécoises en multimédia couvrent tous les aspects du domaine. Les plus connues sont évidemment celles qui commercialisent des produits tels que des CD-ROM ou des logiciels. Cependant, 80 % d’entre elles ne fabriquent aucun produit. Elles offrent plutôt des services conseils et de la formation, ou encore elles sont spécialisées dans la conception de pages Web.

Des conjonctures convergentes

Comment expliquer que le Québec réussisse à tirer son épingle du jeu dans ce secteur hautement compétitif ? Selon Louise Guay, présidente et fondatrice de Public Technologies Multimédia (voir L’Économique, août-septembre 1996, « L’ère du contenu »), l’explication relève à la fois des contextes politique, social et culturel. « Le léger frisson qu’occasionne notre état minoritaire en Amérique fait parfois naître de grandes choses, dit-elle. Nous avons survécu en tant que peuple francophone parce que nous avons toujours été capables de bien maîtriser la communication. De plus, en affaires, les Québécois n’ont jamais eu une attitude impérialiste. Nos entrepreneurs n’imposent pas leurs idées et leurs méthodes. De fait, je dirais que les Québécois, tout comme les Californiens, sont naturellement cools. Ils préfèrent convaincre et séduire. Cela s’est toujours reflété sur la culture des entreprises d’ici où on laisse une grande place à la créativité et à l’innovation. Les Québécois étaient donc déjà bien positionnés lorsque la communication a pris une place grandissante dans la culture d’entreprise. » La géographie comporte également une partie de l’explication, selon l’entrepreneure. « Nous avons l’avantage de prendre rapidement connaissance de ce que développent les États-Unis, dit-elle. Cependant, en multimédia, les Québécois ont eu le flair de ne pas se contenter de copier les Américains. Ainsi, les innovations québécoises vont bien au-delà de la technologie. Elles sont toujours marquées des éléments pédagogiques et éducatifs. De fait, elles se caractérisent par la transmission des connaissances. Cela nous permet, dans une certaine mesure, de bénéficier d’une force par rapport aux États-Unis face au reste du monde. »

Petit, mais reconnu partout

Paradoxalement, certains expliquent que c’est la petite taille du Québec qui lui a permis de bâtir une industrie du logiciel et du multimédia reconnue internationalement. « Le Québec compte assez peu d’investisseurs prêts à s’engager dans des entreprises à forte capitalisation, dit Pierre Savignac, chef de produit Internet chez Vidéotron. Ces investisseurs ce sont tournés vers les industries du logiciel et du multimédia, car elles nécessitent pas beaucoup de capital de départ. C’est ce qui a donné naissance au domaine. Par la suite, il s’est produit une darwinisation du secteur. Les entreprises qui ont connu du succès ont tout naturellement entraîné la création d’autres compagnies, de sous-traitants, de fournisseurs, de consultants, etc.  » L’exemple le plus connu à ce chapitre est sans aucun doute Richard Szalwinski, un des premiers employés de Softimage en 1987, qui a fondé Discreet Logic en septembre 1991 avec deux autres ex-Softimage, Diana Shearwood et Simon Mowbray. Discreet Logic a notamment conçu les logiciels Flame et Flint, utilisés pour l’animation et les effets spéciaux dans des films tels que True Lies, Speed, Forrest Gump et Interview with the Vampire.

Les géants sont bienvenus

L’essor du multimédia au Québec est tel qu’il a rapidement suscité l’intérêt d’entreprise de secteurs connexes qui, aujourd’hui, investissent massivement des ressources financières, physiques et humaines dans le domaine. Pour Michèle Guay, présidente du Centre de promotion du logiciel québécois (CPLQ), l’impact de la participation de ces gros joueurs se mesure à plusieurs niveau. « En peu de temps, rappelle-t-elle, nous avons vu des géants de l’industrie classique des communications, comme Quebecor, Astral, le Groupe Transcontinental, se positionner dans le secteur. Non seulement ces grands groupes ont fourni un apport considérable en capital, mais ils ont injecté au multimédia toute leur expertise en matière de contenu. Ces entreprises savent parfaitement gérer l’information. Leur présence est importante et nécessaire, car le développement de l’industrie passe autant par l’expertise technique que par l’évolution des contenus. » Pierre Savignac, de Vidéotron, insiste lui aussi pour souligner l’importance que prendra le contenu au cours des années à venir. « Nous terminerons une ère, dit-il. Pendant quelques années, nous avons vécu une course à l’accès. L’offre et la demande étaient importantes. Maintenant, le marché s’épure et les joueurs en place consolident leur position. Désormais, il faudra s’attendre à ce que l’accent soit mis sur les contenus. »

Réunir les forces

Selon Michèle Guay, du CPLQ, la diversité des entreprises servira le Québec à ce niveau. Elle permettra au secteur du multimédia de se développer sur plusieurs axes. « Déjà, dit-elle, des maisons de production ont conçu des logiciels de postproduction et d’animation 2D et 3D. De la même façon, de nombreux éditeurs conçoivent des CD-ROM. Cette diversité est un atout de taille pour le Québec sur le plan mondial. » Toutefois, la grande variété des champs d’expertise servira l’industrie dans la mesure où ses forces vives seront réunies. Pour Louise A. Perras, directrice générale du Centre d’expertise et de services en applications multimédias (CESAM), une présence forte du Québec sur les marchés internationaux passe par des partenariats. « C’est là que se joue l’avenir de l’industrie, juge-t-elle. Le Québec est reconnu à l’échelle mondiale pour créer des concepts innovateurs. Cependant, la concurrence mondiale est si forte que nous devons désormais offrir une valeur ajoutée à nos produits. Pour y parvenir, il est impératif que les différents joueurs se concertent et établissent des ententes. Nous pouvons nous inspirer de ce qui se passe dans d’autres secteurs d’activité. Par exemple, en pharmacie, si des compétiteurs comme Uniprix et Jean Coutu peuvent brasser des affaires ensemble, les entreprises de multimédia le peuvent certainement. »

Un nouvel atout pour les entreprises

Un peu à la manière des autres secteurs technologiques récents, le multimédia prend de plus en plus de place tant au près du grand public que dans le fonctionnement des entreprises. Et, dans ce dernier cas, les exemples d’utilisation sont frappant. « Le multimédia est devenu un atout pour les grandes entreprises, soutient Louise Guay, de Public Technologies Multimédia. Elles l’utilisent pour la présentation de leur rapport annuel ou encore elles développent des sites Web qui deviennent de véritables centres de services. De fait, il n’est pas exagéré de dire que le multimédia est maintenant un outil naturel dans la vie d’entreprise. Il entre dans les plans de communication, dans la planification annuelle et dans les stratégies de croissance. » Cette intégration réussite du multimédia ne signifie toutefois pas que la situation actuelle soit parfaite. Il s’agit plutôt d’une première étape. « Il faut admettre que les entreprises connaissent encore mal les nouveautés, dit Pierre Savignac, de Vidéotron. Elles devront développer une veille technologique qui leur permettra de bénéficier des meilleurs outils et d’utiliser de façon optimale les possibilités du multimédia. » Mais l’industrie du multimédia elle-même devra également faire ses devoirs afin de séduire le monde corporatif. « L’utilisation des intranets démontre l’ouverture d’esprit des dirigeants d’entreprise et des décideurs, dit Monique Lefebvre, présidente de Quebecor Multimédia. Toutefois, il faudra apprendre à leur démontrer que le multimédia peut constituer une valeur ajoutée. Nous devons mettre en évidence les solutions aux problèmes que vivent les entreprises plutôt que de focaliser sur la technologie elle-même. Il est inutile de proposer des page Web ou des CD-ROM qui n’apportent rien de nouveau à un rapport annuel. Pour un bon nombre de dirigeants, le multimédia représente l’inconnu. Ils n’osent même pas se servir de leur courrier électronique. Nous devons donc prendre les moyens physiques pour démystifier le domaine. » Pour Stéphane Vaillancourt, vice-président de la division Inforoute et multimédia de Bell, les décideurs ont avantage à maîtriser rapidement les nouvelles technologies. « C’est une question de compétitivité, dit-il. Autrefois, les entreprises solides étaient celles qui accédaient à l’information. Maintenant que cet accès est beaucoup plus large, les dirigeants efficaces sont ceux qui pourront accéder à l’information de façon rapide et qui sauront l’utiliser intelligemment. »

Les enjeux de l’avenir

Si la démystification auprès des gens d’affaires est un enjeu important, il en va de même auprès du grand public. « Le mot lui-même effraie les gens, reconnaît Michèle Guay. Pourtant, lorsqu’ils consultent une encyclopédie sur CD-ROM et qu’on leur explique tout ce qui se trouvent alors dans l’univers multimédia, ils réalisent que l’expérience n’est pas si complexe et si douloureuse qu’ils le croyaient. » Il n’en demeure pas moins que la technologie ne fait pas nécessairement partie de la réalité quotidienne d’une majorité de Québécois. Par exemple, la fréquentation du réseau Internet est légèrement en dessous de ce que prévoyaient les experts à l’origine, particulièrement au Québec. Ainsi, Statistique Canada dévoilait en novembre dernier que le taux d’utilisation d’Internet dans les foyers québécois atteignait un maigre 4,7 %. En comparaison, ce taux atteint 9 % en Ontario et 10 % en Colombie-Britannique. « Mais, avant de penser rejoindre l’ensemble de la population, dit Pierre Savignac, de Vidéotron, nous devons d’abord toucher les quelques 30 % qui possèdent un ordinateur. Pour y parvenir, il faudra améliorer sans cesse la rapidité de communication. » « Il sera aussi important de trouver ce que les anglophones appellent des Killer-applications pour rallier le plus grand nombre de gens possible. Je n’ai pas l’idée précise des moyens éventuels à prendre pour y arriver. C’est par le principe d’essais et d’erreurs que nous pourrons finalement répondre aux besoins. En fait, c’est un peu de cette façon que le réseau Internet est devenu ce qu’il est aujourd’hui. La masse critique a suscité son émergence en combinaison avec une puissance accrue des ordinateurs qui pouvaient désormais être interreliés. »

Retour à la base

Pour Monique Lefebvre, de Quebecor Multimédia, il est temps d’accorder moins d’importance aux prouesses technologiques et, en revanche, de s’assurer de la bonne compréhension des outils multimédias par le grand public. « Je suis totalement contre le discours culpabilisateur de certains experts, dit-elle. Si les gens ne comprennent pas nos produits, c’est à nous de les simplifier. Nous devons, collectivement, prendre un virage et porter attention aux besoins des utilisateurs. Cessons de nous louanger et répondons plutôt aux questions que posent les gens : Qu’est-ce que le multimédia m’apporte ? Est-ce simple à utiliser ? etc. Et il s’agit plutôt de respecter les consommateurs de produits et de services technologiques. Un simple exemple : comment se fait-il que certains CD-ROM ne soient pas encore hybrides? » De son côté, Stéphane Vaillancourt, de Bell, estime que les experts en multimédia devront toujours analyser les situations avec un certain recul. « Il est facile pour les membres de notre industrie de se laisser emporter par l’enthousiasme, dit-il. Cependant, il faut toujours garder en tête que ce sont les consommateurs qui décideront ce que deviendra le multimédia. À cet effet, il faut surtout réaliser que le multimédia est le premier gros choc culturel depuis très longtemps. Nous devons leur apprendre à maîtriser les aspects du multimédia comme ils ont appris à maîtriser, à titre d’exemple, les aspects de la téléphonie. »

Former la relève

La diversité de l’expertise en multimédia représente un autre enjeu important selon Michèle Guay, du CPLQ. « On trouve actuellement assez peu d’experts en marketing pour commercialiser internationalement les produits multimédia québécois, affirme-t-elle. De la même façon, nous devons former des scénaristes habitués à œuvrer avec l’interactivité. Présentement, les scénaristes sont principalement issus d’autres domaines, celui de la télévision et du cinéma, par exemple. La formation de spécialistes devient encore plus capitale quand on pense que certaines compagnies sont passées de 12 à 60 employés en moins de deux années. Des gens qui s’étaient lancés en affaires avec quelques copains doivent maintenant affronter les défis d’une croissance rapide. » Et cette croissance n’est pas exclusive aux petites boîtes. Pierre Savignac, de Vidéotron, souligne que le marché évolue si vite que plusieurs joueurs doivent établir des plans trimestriels aulieu de le faire sur une base annuelle.

Vidéotron : une cinquantaine de projets sur la table

Dans l’industrie du multimédia au Québec, Vidéotron a la particularité de jouer sur deux tableaux : l’accès et le contenu. L’entreprise a lancé, le 10 juin dernier, un service d’accès au réseau Internet par modem-câble et par ligne téléphonique. La technologie du modem-câble rend le multimédia praticable en temps réel. Précédemment, il était possible d’obtenir des images vidéos, mais il fallait attendre jusqu’à une heure avant de visionner une séquence de quelques secondes. Maintenant, un utilisateur peut visionner une séquence en temps réel pendant que la suite continue d’être téléchargée.

Commerce, échange et information

Vidéotron a aussi lancé, le printemps dernier, son site Web InfiniT. Celui-ci regroupe, entre autre, une section nommée Quartier des citoyens qui présente, en 23 sections, de l’information sur, par exemple, l’actualité, la météo, le tourisme et le monde des affaires. On y retrouve également une section nommée Boutique, où l’on peut se procurer divers produits de détaillants tels que Le Coin des petits, Monsieur Félix & Monsieur Norton, la boutique du musée des Beaux-Arts de Montréal, etc. « Nous développons présentement, avec la Banque Nationale et l’entreprise américaine Cybercash, différentes possibilités de transactions bancaires et commerciales, indique Pierre Savignac, chef de produits Internet de Vidéotron. Pour l’avenir, nous croyons en l’énorme potentiel des transactions financières à travers l’Internet. « D’un point de vue commercial, Pierre Savignac décrit le positionnement futur de Vidéotron comme celui d’un entremetteur entre vendeurs et acheteurs.

Le lien entre vendeurs et acheteurs

Sans en donner les détails, Pierre Savignac fait aussi état d’une cinquantaine de projets (nouvelles technologies, alliances, développement de contenu, etc.) sur lesquels les dirigeants de l’entreprise se pencheront durant les prochaines semaines. À titre d’exemple, l’accès à l’Internet sur l’écran de télévision, la mobilité grâce au partage des points d’accès à travers un consortium international, ou encore des alliances avec des services d’archives ou des bibliothèques.